[rp][Drasnie] Le jour où le mauvais s'excusa d'être encore là !

Messages : 10 Date d'inscription : 09/09/2008

"Ta gueule Platime, tu me retournes l'estomac avec tes absurdités ! On n'ira pas en ville chercher à manger. Pense avec ta tête pour une fois, Stragen devrait pointer le bout de sa truffe, il ne faut pas le rater."

Les trois assassins avançaient lentement dans les broussailles. Thomas dit "la Gamberge" menait la troupe, le visage refermé sans doute agacé par les jérémiages incessantes de Platime et de son estomac.

Il regarda les alentours, ses informateurs avaient vu la veille leur cible prendre la route de Sémur, il ne devrait plus tarder. Ils s'embusquèrent dans les fougères, Thomas pointait son arbalète sur le chemin, mieux valait prendre Stragen à distance.

"Le balafré est là, je me le fais cette fois, cet enfant de put*** m'a défié la dernière fois, il va crever aujourd'hui."

Le gros Platime venait de parler encore une fois, mais cette fois l'idée était plutôt bonne. La Gamberge lui désigna une souche gigantesque qui était sur le bord du chemin. Platime compris qu'il devait s'embusquer à cet endroit et attaquer le blondinet à l'oeil mort. Thomas fut surpris de ne plus voir Mélisse, la garce avait dû trouver sa cible. Il la chercha du regard un cours instant et l'aperçut prête à bondir du côté gauche du chemin.

L'arbalète se décala légèrement désignât de sa pointe rouillée, l'ex Drasnien.

"Le Roy des rois te salue !" Avait-il murmuré à l'attention de Stragen qui ne pouvait entendre.

Un sourire naquit, un doigt se crispa, il allait répandre le deuil.

Messages : 10 Date d'inscription : 29/08/2008

Son ventre gargouillait sans cesse, la faim lui tiraillait les entrailles. Il avait beau se plaindre à Thomas du manque de nourriture, le bras droit du Roy des rois n'en avait rien à faire. Ils avaient quasi rien avalé depuis leur départ de Huis bandieten, forçant l'allure jusqu'à la ville de Sémur. C'est ici que les informateurs les avaient attendu, c'est ici que la page Stragen serait tournée. Le dragon jurassien l'avait mauvaise, lors qu'un ours à faim il devient fou furieux et aujourd'hui c'était le cas.

Des sabots se firent entendre plus loin, six personnes arrivaient sur eux. Stragen ouvrait la marche, mais une autre personne attira son attention. Le blond au regard de tueur. Le Blond à l'oeil unique qui s'était dressé entre son appétit sexuel et la sémuroise à la poitrine inoubliable.

"Le balafré est là, je me le fais cette fois, cet enfant de put*** m'a défié la dernière fois, il va crever aujourd'hui."

Thomas approuva et lui désigna une souche gigantesque. Rampant tel un serpent il glissa sans bruit jusqu'aux racines mortes. Il libéra son hachoir, les jointures de ses doigts blanchirent sous la pression de sa main sur le manche de l'arme. Il ne quitta pas des yeux se semblant de militaire, ensuite il irait se faire l'une des donzelles, voir les trois.

Messages : 15 Date d'inscription : 28/08/2008

Mais puisque je vous dis que je suis infâme!

Snell jouait l'innocent comme il aimait bien faire ne présence de dames. Avec de grands gestes et d'improbables récits, il se dressait un portrait impossible mais très amusant, l'important n'étant point de se mettre en valeur, mais bien de faire rire et sourire les femmes.

La journée était belle, la compagnie plaisante et le groupe conversait en avançant. Le Borgne se tourna vers son presque frère.

Eusaias, n'est-ce pas que je suis infâme?

Messages : 33 Date d'inscription : 28/08/2008 Localisation : à sa recherche...

A Huis Bandieten, elle avait trouvé des bains dignes de ce nom dans l'établissement des vendeuses de plaisir. Thomas, qui l'avait précédemment traitée comme telle aurait trouvé la coïncidence amusante, voire prophétique. Quoi qu'il en fut, rien ne valait un corps de femme fleurant bon et ce fut quasi transformée qu'elle était apparue de nouveau dans la ruelle. Son objectif cette fois : trouver le forgeron de Belladone, feue sa dague bien aimée et pourquoi pas au passage, dénicher une boutique de vêtements.

A Huis Bandieten, une fois de plus, elle avait trouvé un ensemble lui seyant à merveille, des braies de cuir épousant ses courbes, un chemisier blanc aux longues manches qui dépassaient de sa veste de cuir elle aussi, et dont le poignet retroussé venait recouvrir la manche de son veston et de nouvelles bottes au bout renforcé de fer.

A Huis Bandieten, véritable caverne aux trésors, elle avait retrouvé Mordock, le forgeron cul de jatte qui avait forgé son arme fétiche. Elle lui avait parlé de Stragen, de ce cadeau, cette pièce unique, qu'il lui avait offerte. Ses yeux s'étaient éclairés : "l'oeuvre d'une vie" avait-il répondu. Puis il lui avait dit qu'il n'en avait hélas pas de semblable et qu'en forger une autre prendrait beaucoup de temps. Elle avait pris un air affligé... une moue dépitée... lui lançant un regard des plus affectés. Il s'était alors rendu dans sa remise, y dénichant un coffret de bois dans lequel siégeait une dague à la garde finement ciselée. La lame très affûtée avait séduit Mélisse, qui l'avait prise en main, caressée puis maniée, laissant ses doigts retrouver dextérité et expérience.

C'était cette dague qui était cachée dans le veston de Mélisse alors qu'elle se déportait sur la gauche de Thomas, apercevant déjà au loin, sur sa monture, une cavalière aux cheveux blancs. Un rictus vint déformer son visage un instant. Elle hésitait déjà entre la tuer pour faire souffrir Stragen avant que Thomas ne l'achève et simplement la blesser... Peut-être Platime pourrait-il lui trancher une cheville au passage pour lui couper toute possibilité de fuite. Et puis, une catin, même avec un seul pied, ça pouvait gagner son pain : Mirtaï serait contente...

Messages : 59 Date d'inscription : 23/08/2008 Localisation : Âme errante...

... Voilà des mois que la troupe était sur les routes. Ils avaient affronté le froid, la pluie, la neige aussi afin de retrouver le Duc de Louhans et le ramener à bon port.

Bien qu'éreintant, leur périple s'était avéré extraordinairement doux pour Zhaïa. Elle avait revu son Poitou natal et refait les chemins de son enfance, ceux qu'elle parcourait en compagnie de son très cher cousin Noegor... Dieu que cela était loin...

La jeune femme avait convaincu Eusaias de revenir aux beaux jours, pour un tour de barque sur les canaux du marais poitevin. Elle lui avait raconté le ballet des libellules durant les chaudes journées d'été... Un sourire éclatant apparut sur son visage. Les liens les unissant, se renforçaient jour après jour, un amour sans faille. Zhaïa donnerait sa vie pour lui sans aucune hésitation. Ils étaient liés à jamais...

Une ombre passa sur son visage et un frisson glacé lui parcourut l'échine. La jeune douanière n'avait pas raconté à son époux les raisons qui l'avaient fait fuir Poitiers par un bel après-midi ensoleillé. Elle avait enfoui ce souvenir bien au fond de sa mémoire des années durant.

Poursuivie par les hommes et les chiens du Comte du Poitou, elle avait été laissée pour morte au fond d'une ravine. Chassant ses sombres pensées, elle revint goûter au bonheur du moment. De toutes façons le Comte était mort et enterré depuis belle lurette, et il y avait bien peu de chances qu'on la reconnaisse. Jadis flamboyante, sa chevelure devenue blanche contrastait étrangement avec sa jeunesse et sa beauté.

Snell était de charmante compagnie, il était même parvenu à dérider l'imprévisible Jusoor. Nul doute que le retour à Sémur leur mettait du baume au coeur. Ils rentraient enfin chez eux, mille et un projets en tête. Dans leurs bagages ils ramenaient deux nouveaux amis, Constance et sinople.

Zhaïa tourna la tête vers son époux, sourires, regards complices. Visiblement Eusaias se retenait de ne pas forcer l'allure. Ils n'étaient plus qu'à à quelques lieues de Sémur...

Constance était silencieuse, sa fatigue du matin s'était dissipée et elle se laissait bercer en cadence au rythme de la marche de son canasson. Elle était détendue, les jambes relâchées, une main légère tenant les rênes, l'autre fouillant le fond de sa besace à la recherche d'un reste de festin. Le groupe avait ralenti l'allure et progressait tranquillement se sachant bientôt arrivé à destination.

Elle profita de ce moment d'accalmie pour finir un morceau de pain devenu un peu trop dur et tout en l'écoutant parler, elle regardait en souriant les mouvements ondulants de la cape de Snell qui gesticulait en narrant des anecdotes délirantes.

D'abord entourée des autres, elle avait vite préféré changer de place pour se retrouver à gauche, entre l'épouse d'Eusaias et le bord du chemin. D'une part parce qu'elle aimait la douce compagnie de Zhaïa mais également pour se tenir le plus loin possible de Jusoor. La jeune bretonne tentait au maximum d'éviter tout contact avec la furibonde ou même de croiser son regard ne voulant en rien altérer son calme et sa bonne humeur.

Quelques semaines plus tôt, Constance avait retrouvé Eusaias qu'elle pensait ne jamais plus revoir. Elle avait pu lui montrer le fruit de son travail et quel visage souriant il avait réussit à remodeler après leur rencontre, cette mauvaise nuit d'été. De tout le Royaume, il était le seul à connaitre son passé militaire, le seul à connaitre son origine. Aux yeux de tous, elle était une mignonne petite béarnaise, gentille petite françoyse...

Le Mauvais lui avait présenté son épouse et très vite, elle avait changé sa destination et accepté l'invitation à les suivre. Avec d'abord la peur au ventre de quitter les côtes qu'elle longeait dans l'anonymat pour gagner la frontière italienne. Puis l'aise de se mouvoir en plein milieu de ce pays et de raconter aux trop curieux qu'elle rendait visite à sa grand mère. Enfin le plaisir d'apprendre à connaitre les françoys, qu'elle ne haïssait plus, qu'elle aimait même pour certains.

C'est ainsi, l'esprit serein et le cœur léger, que Constance arrivait aux abords de Sémur, cette ville dont elle avait tant entendu parler.

Elle s'acharnait et mordait au possible dans ce qui restait de sa miche de pain et en replaçant son sac en toile dans son dos, jeta machinalement un œil en arrière pour s'assurer que nul ne les suivait.

"Bon ben alors si vous le dîtes, je veux bien le croire que vous êtes infâme Snell ! Suis pas contrariante moi..."

Elle tourna la tête vers lui, le regarda et l'imagina alors séquestrant une pauvre vieille. Un éclat de rire s'échappa de la gorge de Ju et se perdit dans le ciel.

Celà faisait des jours maintenant qu'ils étaient venus la récupérer à la Trémouille et qu'ils cheminaient vers Sémur. Et malgré cela, Snell n'avait pas atteint le fond de son coffre à histoires, au grand plaisir de Ju qui aimait beaucoup cela.

Elle regarda au loin, et dans son champ de vision la tête de cette bête des Enfers qu'elle montait apparût et disparût et réapparût.... Elle grimaça.

Rien que de penser qu'elle était sur cette chose, communément appelée "cheval", elle pouvait sentir bleuir ses cuisses et ce qui faisait son joli déhanché féminin.

Elle ne put retenir un grognement de mécontentement mêlé de frustration. Si ça ne tenait qu'à elle, elle serait peut-être des lieues derrière, mais heureuse d'être debout sur ses jambes... Elle tourna alors la tête vers son Maître, discrètement, et lui tira une langue revancharde sans qu'il la voit.
Ce dernier ne lui avait guère laissé le choix : soit elle montait seule un cheval presque fièrement, soit il la ficelait sur le sien... Elle s'était donc pliée à sa demande, n'en pensant pas moins.

Préférant oublier ses maux d'équitation forcée, elle se fit la réflexion que le voyage se passait bien, qu'elle avait raison de rentrer, qu'il était temps pour elle de se stabiliser... jusqu'à une nouvelle envie de voyages.
Mais c'est avec un peu d'appréhension dans le coeur qu'elle retrouverait Sémur.
Rien n'était oublié, ni sa colère, ni sa rage, ni sa Seisan à qui elle n'avait pu dire au revoir encore...

Cette évocation lui pinça le coeur. Elle tourna la tête vers l'Autre, la regarda les yeux remplis de dégoût implacable.

L'ersatz de sa soeur de coeur. Sa seule présence était une insulte. Elle faisait bien de se tenir loin, sinon les mains de Ju auraient déja parlé.
Elle avait été la raison de sa dernière dispute avec Eusaias, celle où elle avait bien crû avoir perdu son Maître. Et elle n'avait rien, absolument rien de commun avec sa douce effrontée. Ju n'avait jamais vu dans ses yeux le moindre éclat de douceur et de joie de vivre.

Elle avait été bien déçue de la voir une seconde fois à La Trémouille et avait hésité à repartir en compagnie du petit groupe. Finalement, elle avait choisi d'ignorer la drôlesse et de mener sa vie comme si elle n'existait pas.

Ju sourit à l'idée que l'Autre ne représentait au final qu'une poussière dans la vie qu'elle avait choisi de mener. Juste une petit caillou sur le chemin, elle cessa même d'y penser, la bougresse ne le méritait pas.

Elle était bien, sereine, elle voyait s'aligner dans son esprit la liste des projets qu'elle avait, prendre des forces, apprendre, apprendre et apprendre... tout ce qu'il y avait à connaître. S'élever, se former et devenir respectable.

La tête du cheval réapparut et brisa le charme vagabond de ses pensées...

"Humpf ! Tu pourrais au moins te faire discret Canasson !...
En arrivant je t'amènerai visiter le boucher et après cela j'aurai plaisir à te voir, mais dans mon assiette !" Ju sourit, mauvaise, à cette idée et se frotta les mains.

Retour d'Anjou pour les enfants de bourgogne, la joyeuse troupe traversait comté après duché dans la joie et l'allégresse. Jusoor, comme à son habitude se plaignait de son cheval, le rabrouait sans cesse. Constance quant à elle se tenait sagement près de lui, de compagnie agréable la jeune femme était rentrée dans le cercle intime de ses amis. Ses yeux de prédateur se posèrent sur le joli minois de Zhaïa, le fait de pouvoir la caresser du regard emballait son coeur qui faisait des bons dans sa poitrine à chacun de ses sourires.

Eusaias, n'est-ce pas que je suis infâme?

Le Mauvais rit. Son presque frère aimait se blâmer pour amuser la galerie.

"M'est avis qu'il faut croire chaque mots qui sortent de la bouche de mon frère. Il est infâme, sot et couard. Il m'a lâchement abandonné en Bretagne un soir d'orage alors que j'étais seul face à quatre bretons sans coeurs qui en voulaient aux dentelles de nos dames."

Eusaias ne put retenir un sourire en se rappelant la partie de dés organisée dans la cave de contre-bande. Il avançait tranquillement, dandiné par les pas du frison. Sémur se distinguait au loin, la mission avait été fructueuse. L'air fleurait bon les épicéas, "le Mauvais" était heureux. Snell, Jusoor, Sinople, Constance et son amour Zhaïa l'encadraient. Il respirait à plein poumon comme si l'oxygène de Bourgogne était meilleur.

Il ne put souffler pleinement, son souffle fut coupé par un choc dans le ventre. Un trait était figé dans son corps, un trait dont la conception était connue du Mauvais. La tête lui tournait, un filet de sang s'écoulait de sa bouche restée entre ouverte, il regarda sans comprendre son épouse. La douleur remonta en un cri sortant du fond de sa blessure.

"AAAAAAAARRRRGGGggghhhh !"

La Drasnie était là, nul doute. Il allait mourir, mais il devait sauver ses amis. Il se laissa tomber de cheval, brisant ce qui dépassait du carreau tortionnaire et libéra "Victoria". "Une dernière danse je t'en prie ma belle" avait il supplié à mi-voix. Il tituba, pointe de la rapière en avant, posa une main contre un arbre pour garder l'équilibre.

"VENEZ !...." il reprit son souffle et secoua la tête pour se remettre les idées en place "Venez m'affronter bande de sal*** !"

Il tomba genou au sol, main dans la poussière. Il se redressa tant bien que mal, il fallait en découdre, ses proches devaient vivre.

Les trois ombres se distinguèrent, Mélisse, Platime et Thomas. Trois des pires Drasniens, des raclures sans coeur. Platime hachoir en main avait décidé de s'offrir son frère Borgne tandis que son ancienne maitresse se dirigeait sur son épouse qui visiblement avait décidé de faire front.

"ZHAÏA ! NON, FUIS ZHAÏA !"

Ses yeux d'oiseau de proie distinguèrent Thomas rechargeant son arbalète, le fumier allait l'achever sans lui laisser une chance.

[Quelque part sur la route entre Cosne et Sémur, pas loin de l'enceinte du village.]

J'aurais juré avoir entr'aperçu les portes de Sémur il y a quelques temps et pourtant, elles semblent avoir disparu... Cette ville a réputation de ville fantôme et je crois bien qu'en plus... elle recule, dis-je pour taquiner mon aimé.

Toute tête en dehors de l'attelage, la main en visière, le sourcil froncé, l'oeil plissé comme pour percer l'horizon, je scrute la ligne lointaine que forment le ciel et la terre quand d'illusion ils se rejoignent.

Je devine le sourire amusé de mon époux assis au devant de la cabine, dirigeant habilement nos chevaux depuis que nous avons quitté Briançon voilà déjà... voilà bon nombre de lunes... Bien trop pour que je puisse compter les jours écoulés depuis nostre départ.

Tu n'as pas rêvé Morgane, quand nous étions encore sur les collines, nous avions vue environnante et dégagée. Et Sémur était bien là, en contrebas.

Je souris, je savais bien qu'il aurait la réponse à mes interrogations. En dépit du bon sens et afin de me surélever, je m'extirpe par la fenêtre de la porte de notre attelage et, assise sur le rebord, je reprends mon observation quand...

CRAAAAAC !!

Je n'ai que le temps d'échanger un regard inquiet avec Marcko quand...

PATACRAC !

Je vois débouler sous mon fessier une roue...

Ah ce n'est rien, juste une roue, que je m'écrie, toute heureuse pour une fois, de connaitre la cause de ce fracas avant mon époux.

Une roue ?
Une roue ?!
Nostre r...

Cause et donc conséquence...

Par Arhhhhhh !!!

Mon cri reste coincé dans ma gorge : l'attelage se met à vaciller de guingois, tout déséquilibré qu'il est à rouler sur trois pattes et mon poids, perché à la fenêtre, ne fait rien pour arranger les choses. Me voilà qui bascule, jambes par dessus tête et tête par dessus jambes, dans un roulé boulé des plus disgracieux et dont la course se termine... les quatre fers en l'air dans un fossé, dos au talus, sous les hennissements moqueurs d'Echalote, ma jument de Castillon et de Théodème, le fidèle Frison de Marcko, que ce dernier vient de faire stopper en urgence.

[Quelque part sur la route entre Cosne et Sémur, pas loin de l'enceinte du village.]

Dame Morgane ! M'sire Marcko !

Cré nom d'un chien !

Dame Morgane ?

Pourquoi qu'y faut donc qu'elle soit si imprudente ??

Dame Morgane ? Z'estes blessée ??

Bon, y'a pas, faut que j'passe ma tiète pour aller zieuter qu'elle a rien.

M'sire Marcko ! Jva descendre pour aider vot' épouse, si vous v'lez ben venir chercher vot' fillotte. Pour sûr qu'ça m'aiderait grand'ment à sortir de là !

Pourvu qu'y s'soit pas déglingué quequ'chose aussi lui...

Dire qu'après avoir parcouru moults chemins de montagne en Lyonnais-D'phiné, moultes vallées en d'aut' duchés, avoir risqué des ennuis en Poâtou à caus' que l'aspirante de prévôté se prenôt déjà bin pour eune lieut'nante, et avoir circulé sur encor bon nomb' d'chemins caillouteux, cte satanée roue, faut qu'elle lâche alors qu'on a presqu'atteint l'but.

M'enfin, j'dis ça, mais j'dis rin... Comme elle disôt toujours m'grind mère : "té plains pô, té pourrôt avoâr pire".

Les de Maussac-Thézan y sont bin. D'brafes gens. J'les ai rencontrés à Lyon, la Rugissante. C'étôt là qu'j'habitôs quand dame Morgane a dû accoucher... L'matrône d'la ville, elle est venue l'aider à mettre sa progéniture au monde, elle m'a croisée en s'rendant à l'chambre de dame Morgane et m'a d'mandé de v'nir l'aider. Faut dire... 12 enfants qu'j'ai eus... Alors j'sais comment qu'y faut faire. Mais l'accouchement, y s'est pas bin bin passé comme on dit... La p'tiote, elle est née morte...

Jme souviens de M'sire Marcko... Y'avôt tell'ment d'douleur dans son r'gard... J'avôs mal pour lui... Il a d'mandé à serrer sa fille - Emma qu'ils voulôent l'app'ler - dans ses bras. Dame Morgane, elle étôt épuisée, à bout d'force... Complèt'ment ravagée par les larmes... Pauv' dame Morgane...
Puis, un miracle s'est produit, y'a fallu qu'elle pousse à n'veau, et la matrône, elle a mis au monde Margot. Une tiote puce, bin plus p'tiote que sa soeur morte mais qui a survécu.

J'suis entrée à leur service quelqu' jours après. Dame Morgane était bin trop fatiguée, elle avôt b'soin d'aide et c'est M'sire Marcko qu'est venu me demander si j'voulôs bin les accompagner dans leur périp'. J'ai dit oui. Mes gamins y sont grands maint'nant et j'ai rien vu d'aut' que l'Artois qui m'a vue naitre et le Lyonnais-D'phiné où mon homme y m'a emmenée. C'étôt l'occasion.

Et v'là qu'maint'nant, en plus de d'voâr m'occuper d'Margot, j'va p'tiète d'voâr soigner l'mère.

Dame Morgane ?? M'Sire Marcko ??

[Quelque part sur la route entre Cosne et Sémur, pas loin de l'enceinte du village.]

Par Arhhhhhh

Riiiiiiiiiistoooooooooooooote ? m'étais-je apprêté à entendre. Par Aristote oui, ce qu'elle peut d'ailleurs l'avoir dans la bouche... Enfin voilà, nul temps pour moi de l'entendre ou pour elle de le dire, je ne sais. Ce qui est tenu par contre pour certain, c'est bien ce postérieur équin sur lequel j'ai été projeté et contre lequel je gis.

Arrêt d'urgence... jvais lui apprendre à mon Théodème, un arrêt d'urgence

Je roule des yeux rapidement, personne n'a rien vu semble-t'il, alors vite je m'éclipse de cette scène. Morgane. Morgane ?

Dame Morgane ? Dame Morgaaaane ?

Déjà la nourrice appelle ma mie. Oh !! et moi !!

Oui oui ! je suis là !! Morgaaaaaaaane ? J'arrive Apolline, passez-la moi.

Hey coucou toi, tu n'as rien ? Je tente une mine rassurante, pour que ma petite ne s'effraie point.

Nous étions si proche de Sémur, satané attelage ! Enfin, il aura tout de même traversé le royaume d'est en ouest, d'ouest en est.

Morgane ? tu n'as rien ? tu vas bien ? Morgane ??

Inquiet, je suis Apolline sur ses pas, pressé de m'assurer que mon épouse ne souffre aucun mal

[Quelque part sur la route entre Cosne et Sémur, pas loin de l'enceinte du village.]

Ah, vlà m'sire Marcko qui réagit à mes cris et qui vient prendre sa tiote dans ses bras. Jva pouvoâr descend' de là.
C'est pas qu'il étôt pô confortab hein, ct'attelage lô, bin au contraire mais comment dire... quand vous avôz été s'coué comme un prunier dans tous ché sens et que vous voyôz pu rien d'aut' que la cabine de vost' maît' en double exemplaire, ben vous avôz b'soin d'prendre l'air.

Sans compter que j'doâs 'cor m'occuper de dame Morgane et avec son époux qui m'colle le train, tout inquiet qu'il est d'jô... chuis sûre qu'y va nous coller la mouise. Pourvu pourvu pourvu...

Bon, j'contourne le carrosse et...

Oh qué misèreuuuuu, que j'm'écrie.

Dame Morgane semble incon...
ah nan, vlà qu'elle remue.

Ché bon signe, m'sire Marcko, on dirôt bin qu'elle est en vie. Bon tournôz vost' tiète et allôz vire ailleurs si j'y chuis.

Ni une ni deux, je r'monte ma jupe, tant pis si le maître y voât mes bôs, pas d'pudeur et mesme pô peur, l'avôt qu'à pas r'garder comme j'y ai dit.. J'rejoins vite fait ben fait dame Morgane, qu'a sa jolie crinière en travers d'la tiète. J'lui ouvre les rideaux, comme on dit, elle me r'garde, ché bon, on dirôt qu'elle est sauvée.

Elle pose ses yeux sur moâ, elle me r'connôt qu'on dirôt... Et... Mfff, je croâs que je doâs avoâr une sale bobine, car vlà t'y pas qu'elle part dans un fou rire.

[Quelque part sur la route entre Cosne et Sémur, pas loin de l'enceinte du village.]

A voir la mine épouvantée de cette pauvre Apolline, je ne puis plus retenir le rire qui monte en ma gorge et j'en éclate à en avoir mal aux côtes.

Une fois calmée, elle m'aide à me relever et à sortir de ce fossé où, pas un affreux concours de circonstances, je me suis embourbée.

Oui, embourbée, c'est bien là le terme qui convient. Pas de doute en effet, la réputation de la Bourgogne ne tient pas seulement qu'à la coiffe dont se parent les habitantes de ce duché - coiffe que j'arbore d'ailleurs moi-mesme bien souvent car elle a ce côté pratique qui fait que vous n'avez pas les cheveux dans les yeux comme je les ai présentement.
Cette réputation des escargots de Bourgogne, car vous avez bien compris que c'est de cela qu'il s'agit, vient aussi de ce temps plus... humide... que par chez nous autres habitants des Montagnes.

L'on dirait, bien chère Apolline, que le temps est au redoux... Plus on descend dans la vallée et plus...

Je sens alors des mains qui me frictionnent et me passent en revue sous toutes mes coutures, mesme celles dont j'ignorais jusqu'à l'existence.

Apolline, je crois que ça va... Je me sens bien ! Lâchez donc mon oreille... Je vous l'assure : elle n'est pas cassée... Et... Mais... chela chuffit, laichez donc mes choues dranguilles... Che bochèdes encore doudes... mes dents !

Je me frotte les joues, dont la nourrice de ma fille vient de se désintéresser pour s'atteler désormais à la vérification de mes articulations.

Apolline s'il vous plaît, JE - VAIS - BIEN.

Ma Dame est ben trop imprudente si vous v'lez mon avis. Est-ce là donc l'exemp' qu'vous voulôz donner à vost' petiote ? Jva finir l'examen et seul'ment après cha, j'serôs rassurée et m'sire Marcko vot' époux aussi. Figurôz-vous qu'on étôt inquiets pour vous !

Nulle possibilité de me soustraire, d'autant plus que son ton ne souffrirait aucune réplique : je la laisse donc m'examiner et s'assurer que je n'ai rien, échangeant pendant ce temps des regards complices et amusés avec mon époux qui a compris depuis longtemps déjà que je suis entière.
Nostre fille s'est endormie, nichée dans les bras de son père. Je souris : il a ce don pour l'apaiser chaque fois qu'il la prend contre lui. Père et fille vont si bien ensemble, le spectacle est attendrissant. Je les aime, tous les deux, du plus profond de mon coeur et j'aime aussi Apolline mesme si...

VOUS ME FAITES MALEUUUUU ! Je vais bien, vous dis-je !

[Quelque part sur la route entre Cosne et Sémur, pas loin de l'enceinte du village.]

Apolline enfin rassurée, je dépose à la fois Margot dans l'espace des bras de sa mère ainsi qu'un tendre baiser sur le front de cette dernière.
Les mains désormais libérées du plus joli des "paquets", je me les frotte l'une contre l'autre et me retourne vers ce satané attelage. L'objectif en tête d'entreprendre une réparation-sauvetage avec les moyens du bord, je me mets à parler tout haut, plus à mon intention qu'à celle de ma mie et d'Apolline.

Comment se peut-il qu'une roue se détache ainsi ?

J'en suis là de mes réflexions circulaires, quand je sursaute et me retourne vers Morgane. Je lis dans ses yeux au bleu si clair l'interrogation : est-ce bien un cri que nous venons d'entendre ?

L'ambiance, qui prêtait à rire un instant auparavant, semble s'être alourdie. Je retiens ma respiration et...

ZHAÏA ! NON, FUIS ZHAÏA !

Nul doute n'est désormais possible. Un homme vient de crier et cet homme, nous en connaissons l'identité. Le regard de mon aimée trahit maintenant la panique. Je m'approche d'elle et du creux de ma paume droite, je viens câliner son visage. Je dépose au passage un baiser sur le front de ma petite, que le cri n'a pas tirée des bras de Morphée.

Ne bouge surtout pas, dis-je à mon épouse. Reste ici avec Apolline et Margot, je vais porter secours à notre ami et à sa douce, à qui je dois tout.

Mes yeux se posent sur les hautes chairs du bras de Morgane. Je les détourne très vite, me saisissant des rênes de mon Frison. Apolline me le détache du système de l'attelage et je l'enfourche. Un dernier regard en arrière et...

Hue Théodème ! Au triple galop mon brave !

Messages : 15 Date d'inscription : 28/08/2008

[Lieu de l'embuscade]

Snell bascula du mode fanfaron au mode combat avec une aisance presque déconcertante. Le vétéran guerrier avait vu assez de guerres pour ne pas être décontenancé par un ami blessé. Le danger était toujours présent et il devait être neutralisé avant de voir à Eusaias. Ils ne pourraient pas l’aider s’ils étaient morts.

Dégainant sa lame, le Borgne aperçut trois formes qui leur fondaient dessus. Il avait déjà rencontré le géant à la hache et la beauté fatale alors qu’il voyageait avec Sylvie, mais le troisième avec l’arbalète était nouveau. Ils avaient un lien avec Eusaias, mais Snell n’avait jamais songé à demander des explications à son frère. Ils étaient clairement des ennemis mortels et cela lui suffisait.

L’arbalétier rechargeait d’ailleurs son arme et Snell éperonna sa monture pour fondre sur lui, mais sa route fut barrée par la montagne de chair qu’était Platime.

Une ou deux railleries avant d’entamer le combat ? Non, le Borgne était plus intéressé à le tuer que de lui parler. Mais bon sang qu’il sentait mauvais ! Faisant fi de l’odeur, il lança une série d’attaque du dos de son cheval et le géant les para avec une relative facilité avant de riposter.

Snell bloqua également, mais se rendit compte que ce combat ne serait pas aisé. Platime avait une force démesurée et savait se servir de son hachoir. Crispant sa mâchoire, le Borgne retourna à l’attaque.

Messages : 10 Date d'inscription : 29/08/2008

Le carreau qui avait fait mouche fit sourire Platime. Il sortit de derrière les racines et fonça à l'encontre du blond. Une fraction d'une seconde il fut surpris de la réaction du cavalier. L'homme semblait bien plus fort qu'il ne pensait, bien plus déterminé. Les premiers coups furent échangés sans vraiment de réussite, il fallait tester l'adversaire comme l'exigeait la règle d'or du petit meurtrier. Le sourire s'effaça du visage disgracieux du Drasnien, pour battre le cavalier il allait devoir utiliser tous ses moyens.

Il recula d'un bond et réassura la prise de son hachoir.

" Toujours aussi brave Balafré ! Mais cette fois je vais te faire plein de petits trous dans les entrailles. Tu n'aurais jamais dû croiser la route du puissant Platime."

Le cavalier était en position de force grâce à l'allonge de son épée et à sa hauteur dominante. Platime se racla la gorge et laissa tomber au sol une immondice jaunâtre. Il estima qu'il fallait désarçonner le cavalier, le soucis étant qu'il avait ni vouge ni pieu. Il réfléchit un bref instant et opta pour utiliser son style le plus efficace, la force brute.

"RHAAAA !"

il plongea sur le cheval, son hachoir faisant de terrible moulinet !

Ju était repartie dans ses réflexions après sa dernière remarque au canasson. Elle suivait le mouvement, un peu amorphe et subitement prise de fatigue.

Le cri qu'elle entendit alors la fit sursauter et frémir. C'était bien de la gorge de son Maître qu'il sortait, et vivement, elle tourna son regard vers lui. Elle était consternée :
"Mon dieu ! du sang..." puis elle le vit sauter à bas de son cheval, briser la flèche qui le transperçait et se diriger vers un bosquet, affaibli mais volontaire, hurlant sa rage à la nature.

Ju ne comprenait pas. Elle avait porté les mains à sa bouche de stupéfaction et d'inquiétude mêlées.
Son coeur battait la chamade, mais son esprit s'enlisait. Tout lui semblait irréel, comme si elle se trouvait en plein milieu d'un mauvais songe. La course du temps s'était ralentie, puis arrêtée. Elle voyait son Maître se débattre, tomber et se relever. Elle le quitta des yeux, un instant, livide, et aperçut alors les trois menaces s'avancer vers leur petit groupe.

Elle comprit immédiatement. Il y a bien longtemps, une éternité, il lui avait conté son passé peu glorieux.

Son esprit partit cette fois dans milles directions.

Elle vit d'abord une ombre féminine, louvoyante et déterminée se diriger vers Zhaia, sa presque soeur, puis un monstre fait comme un taureau massif, baver de rage face à Snell, et enfin... un semblant d'homme, mi-rat, mi-nain, puant la sournoiserie et la lâcheté, avancer vers Eusaias tout en se réarmant.

Elle n'eut pas le temps de réfléchir que son instinct lui intima l'ordre de sauter de son cheval et d'aller se placer derrière un bosquet d'où elle pourrait sans doute intervenir. Elle tata ses poches, ils étaient bien là ses cailloux, tous, ce n'était rien d'exceptionnel mais elle savait les manier avec aisance et justesse.

Elle fit une étude rapide de la nature qui les entourait et trouva le meilleur lieu de tir qu'elle ait pu lui donner. Avec un sourire malsain, elle courut donc jusqu'à cet arbre, où Eusaias s'appuyait, juste assez près de la troupe funeste pour que ses lancers soient efficaces et y grimpa agilement. Elle attendit là que le temps fasse son oeuvre et que le rat sournois soit suffisamment près pour le blesser. Elle n'osait regarder son Maître plus bas, elle voulait rester concentrée sur le monstre qui le menaçait, toutefois elle se maudissait intérieurement de ne pas avoir appris à se battre encore et serra les machoires et ses petits poings sur les plus gros cailloux qu'elle avait sorti de sa poche...

[Quelque part sur la route entre Cosne et Sémur, pas loin de l'enceinte du village.]

Margot dans les bras, je suis là, muette et consternée de voir celui qui fut un jour le plus grand homme du Lyonnais-Dauphiné foncer vers le danger en m'intimant de rester là. La panique allant decrescendo, je regarde Apolline et tente de la rassurer en plaisantant, comme à mon habitude :

Depuis quand messire mon époux se permet-il de jouer les héros sans moi ?

J'ai beau savoir le conseil prudent, j'ai beau savoir que nostre fille a besoin de sa mère, n'en a-t-elle pas autant besoin de son père ?

Zhaïa et son époux ont vraisemblablement des ennuis, probablement une bande de brigands. Dans mon esprit, les informations enregistrées quelques minutes auparavant, tournent en ma tête pour évaluer les risques qu'encourt mon aimé :
Je connais suffisamment ce bougre d'Eusaias pour le savoir capable de s'occuper d'au moins deux d'entre eux. S'il a enjoint Zhaïa de ne point s'en mêler et de fuir, c'est qu'ils sont au moins deux fois plus nombreux et que mon Marcko ne sera pas de trop.

RHAAAA !

Un nouveau cri déchire l'air et celui-ci me glace le sang. Je reconnaitrais cette voix entre mille pour l'avoir entendue durant une bonne partie de ma vie, claironner et arbitrer les combats de coupe-jarrets au cerbère.

Platime...

J'ai lâché ce nom d'une voix blanche et tremblante. La nourrice a mes côtés ne semble rien comprendre. Nul étonnement à cela, elle n'était pas là quand Thomas et deux des pires tueurs de Drasnie ont débarqué à Briançon, exigeant de mon époux qu'il me blessât à mort de sa propre main.

Marcko !

Mes yeux s'équarquillent, plus aucune envie de dédramatiser. Je place avec soin ma fille dans les bras de sa nourrice, j'emballe quelques vêtements et langes dans une grande besace que je tends à Apolline.

La ville de Sémur est à une lieue tout au plus. Foncez vous mettre à l'abri dans la première auberge que vous trouverez et surtout, n'inscrivez pas Margot auprès de l'aubergiste sous le nom de De Maussac-Thézan. A compter de maintenant, c'est Margot Petiteau, et ce, jusqu'au retour de l'un ou l'autre de ses parents... Les deux dans le meilleur des cas.

Je glisse dans la besace une grosse gourde d'eau et m'arrête un instant pour admirer mon enfant. Elle a les cheveux de son père, blonds comme les blés. Mon regard s'embue. Marcko.

Ne vous retournez pas Apolline, marchez, encore et encore jusqu'à Sémur. Protégez Margot comme s'il en allait de vostre vie. Je vous en conjure. Elle et son père sont ce que j'ai de plus précieux.

Je retourne vers l'attelage et en sors Demeter. Mon épée... Forgée à la sueur de mon front expressement pour la Drasnie. Elle n'a encore jamais eu l'occasion de verser le sang mais je me suis longuement entraînée à la manier, dans la forêt du Champ de Mars, à la sortie de mon village. D'un mouvement rapide, je lui fais fendre l'air. Le sifflement produit sonne comme un glas.

A dos d'Echalote, je pars au galop sur les traces de mon aimé. En ma tête résonnent au rythme des sabots de ma jument leurs prénoms : Marcko... Margot... Feue Emma... Apolline... Eusaias... Zhaïa... Marcko... Margot... Feue Emma... Apolline... Eusaias... Zhaïa... Qu'Aristote nous vienne en aide !

[Lieu de l'embuscade]

A chacun... sa croix. Ça et là, de troubles tourments mal enterrés, antécédents honteux ou autres secrets inavoués. Chacun portait la sienne.
Et en ce jour froid mais néanmoins ensoleillé, certains allaient ressentir la leur, plus lourde qu'à l'accoutumé.

D'une main, Constance referma soigneusement sa besace dans son dos et de son regard, balaya derrière elle, le chemin d'où ils arrivaient. Rien que des arbres à perte de vue, un sentier libre et nuagé de poussière, laissée par les pas lents et réguliers des chevaux.

"Humpf ! Tu pourrais au moins te faire discret Canasson !...

Elle prit appui de sa main libre sur la croupe de sa jument pour mieux se remettre en selle et se remis dans le sens de la marche.
Tous les yeux amusés étaient posés sur Jusoor qui pestait sur son cheval.

Constance continua de regarder un moment la protégée d'Eusaias. Elle ne voyait pas son visage, caché par le balancement de ses cheveux, rythmés par les foulées de la pauvre bête qui la (sup?)portait. Et durant un bref instant, elle cru revoir en elle sa Mallorie. Ce n'était pas la première fois, tant la ressemblance était frappante et pour effacer cette image, elle tourna vivement son regard qui se posa sur Eusaias.
Heu-reux ! qu'il semblait être. Il souriait à son épouse et on lisait sur son visage une sérénité plaisante à voir.

Subitement, Constance lâcha son crouton de pain qui tomba sur la crinière de la pouliche puis s'échoua par terre. Son ami venait de se crisper et une pointe de s'introduire en lui. Elle pu voir les traits de son visage se déformer, avant qu'il ne pousse un cri et ne se laisse glisser de son cheval.

*Après tout ce temps passé sur les routes ?! à si peu de lieues et le jour présumé même, de notre arrivée ?! Non ! Eusaias qui appelle à bout de souffle ses tortionnaires à finir le travail commencé... NON !*

Laissant son inconscient se déméler avec toutes ses réflexions, elle attrapa fermement ses rênes à deux mains et donna un franc coup de talon dans les flancs du cheval qui, surprit par le changement brusque de sa cavalière hénnit et lui obéit.

*Il va mourir* pensa-t-elle en voyant Eusaias tenter de se relever et du sang couler de sa bouche.

Snell avait été rapide et c'est presque, aussitôt le coup reçu par son frère, qu'il avait foncé vers le tenant de l'arbalète, sa course stoppée par un... un monstre ?!! Non... un homme. Un molosse. Et s'en suivit entre les deux un duel où chaque coup porté devenait plus fort.

"ZHAÏA ! NON, FUIS ZHAÏA !"

Alors qu'elle s'était ruée au devant de son ami blessé, Constance tourna rapidement la tête vers Zhaïa, dont le visage avait changé d'expression. Jamais, elle ne l'avait encore vu comme ça, les yeux de la douce s'étaient emprunt d'agressivité et elle faisait face à son assaillante qui venait vers elle.

Pas de choix possible, si elle allait l'aider, la Gamberge décocherai une seconde flèche qui serait fatale à Eusaias. Piètre bouclier, postée à deux pas de lui, elle espérait que le cheval serait suffisante protection et relevant les yeux vers le tireur, elle cherchait la solution a un problème qui ne quittait pas son esprit.

Une nuée de poussière derrière les sabots de Théodème, nous fonçons lui et moi en direction des cris entendus.

Le voyage en attelage l'a rendu puissant, plus large sous mes jambes, les muscles développés. Bien pour tirer un chariot, mais bien moins pour tenir une vive allure. Je martèle au malheureux mes talons dans ses flancs sans cesser.

Diantre, j'espère que le virage du chemin ne m'a pas fait perdre la bonne direction !

Parvenus plus au sud, j'envoie ma monture à travers champs, nous emmenant vers l'est désormais.

Vite Théodème ! Fait honneur à ta race, fait honneur à tes pères, galope, galope !

Messages : 33 Date d'inscription : 28/08/2008 Localisation : à sa recherche...

[Lieu de l'embuscade]

Quel foutoir... Thomas avait tiré trop tôt, se réservant l'effet de surprise sur Stragen mais annonçant leurs positions avant qu'elle et Platime n'aient eu le temps de fondre sur leurs adversaires. Elle détestait les arbalètes ! Parce qu'elles étaient armes de lâches.
Il lui fallait avouer que de voir ce carreau planté dans le ventre de celui dont elle avait partagé la couche durant des années lui avait fait quelque chose. Elle avait beau vouloir sa mort, il ne méritait pas celle que la Gamberge lui réservait.

Stragen devait mourir comme le téméraire, comme la tête brûlée qu'il avait toujours été. Pas comme un pourceau abattu de loin et sans gloire.

Tsss, serait-elle en train de compatir ? Elle serra les mâchoires, se raccrochant à l'image du sourire qu'il arborait en regardant sa douce, quelques minutes avant d'être planté. Symbole de pur bonheur s'il en était. Elle pesta, ragea, sentant la colère la faire redevenir de glace. Son coeur était de pierre, le seul semblant d'humanité qu'elle avait eu avait été l'amour qu'elle portait à Stragen du temps où tous deux se côtoyaient au quotidien.

En la plaquant, il l'avait tuée de l'intérieur. C'était au tour de Zhaïa de payer.

Un dernier regard vers son ex-amant, genou à terre, se retenant à un arbre lui permit de remarquer une ombre se glisser derrière lui et se positionner en hauteur. Une autre jeune femme accourait à ses côtés à dos de monture. Il avait toujours plu aux femmes, le bougre. Il ne séduirait bientôt plus personne. Laissant là ses pensées, elle apparut au milieu du chemin, face à la cavalière aux cheveux blancs.

Bonjour garce ! Me reconnais-tu ?

La nouvelle dague de Mélisse dansait entre ses doigts, virevoltant avec toute l'expérience acquise par des années de contrats honorés.

J'ai un message pour toi. De la part d'Aristote. Il m'a dit qu'il fallait que tu le rejoignes au plus vite.

La tueuse fit un pas en avant, puis un autre, et encore un autre, de plus en plus vite, fonçant en zigzaguant vers le destrier de Zhaïa. Arrivée à sa portée, elle se pencha, amassant dans sa main une poignée de poussière qu'elle jeta à ses naseaux. Le cheval se cabra.

Messages : 10 Date d'inscription : 09/09/2008

Un rire sadique semblable a un gloussement de dinde sortait de la gorge de la Gamberge. Il se mettait à découvert ce qui était rare venant de lui. Il préférait de loin faire exécuter ses tâches, il était un homme de l'ombre. Viscieux à souhait il posa avec une lenteur calculée la tête de l'arbalète et commença à actionner les manivelles pour tendre à nouveau la corde. Il fixait Stragen dans les yeux comme par défi.

" Tu sais sale rat, il ne faut pas m'en vouloir. Je ne suis qu'un pauvre serviteur du "Roy"."

Amusé il marqua une pause. Il retira son capuchon de sa tête afin qu'aucun doute sur qui tuait "Eusaias" ne soit possible.

" On t'a cherché depuis bien longtemps, serais-tu devenu lâche au point de te cacher ? Oh pendant que je pense à cela je préfère te prévenir tout de suite, j'ai promis tes amies à Platime. il en prendra soin comme tu le sais."

Le gloussement retentit une seconde fois. Il profita de ce court moment de calme pour placer la flèche dans le sillon de l'arme.

"C'est étrange de te refroidir. Mais jouissif à souhait ! Je n'ai jamais supporté ton assurance, ton courage. Pour moi le courage est proche de la stupidité. Regarde donc ta femme par exemple, elle s'aveugle de son courage, Mélisse va le lui faire payer."

Il pointa sa cible une seconde fois de son arbalète.

" Bon prend soin de toi en enfer, je serai bien resté à discuter.... mais je n'ai pas envie de te laisser la moindre chance. "

Il avança de plusieurs pas pour ne pas rater la tête de l'ex drasnien.

[Entre le lieu de l'accident d'attelage et celui de l'embuscade]

Le cri d'Eusaias avait semblé provenir du sud est par rapport à nostre position. La direction prise par Marcko avait confirmé le fait qu'il pensait la mesme chose que moi. Le second cri poussé par Platime m'avait ôté tout doute possible. C'est donc à bride abbatue, galopant à tombeau ouvert que je tente de rattraper mon époux.
En mon sein, je sens mon coeur qui bat à tout rompre, au souvenir de la main vagabonde de Platime, arrachant mon corsage, caressant ma peau, sa langue bavant de lubricité à mon oreille ; battant la chamade au souvenir du stylet d'Eusaias que j'avais planté dans la cuisse du monstre pour m'échapper...

Il n'allait pas aimer me revoir, l'enfant de sa... Je me retiens de penser ces mots, je ne suis plus la dark de Drasnie, je ne suis plus la jeune femme effrayée qui se cachait chez Bourdot le sage en attendant qu'on la ramène à l'Auberge des Plaisirs Interdits afin qu'elle subisse le mécontentement de Mirtaï...

Je te maudis Kheldar ! Je te hais Platime, comme le pourceau que tu es !

Sans m'en rendre compte, j'ai laissé la colère bouillonnant en moi remonter à mes lèvres comme pour me donner courage car de fait au loin, j'aperçois la monture de Marcko, que je rejoins bien vite. Théodème peine à garder vive allure... Ces mois passés sur les routes l'ont taillé pour l'attelage et non plus pour la course.

Nos regards se croisent, j'y lis sa désapprobation puis sa résignation :

Ne m'écouteras-tu donc jamais, l'entend-je murmurer.

Nous nous reconcentrons sur nostre route : déjà au loin apercevons-nous un fouillis indescriptible fait de chevaux, de gens à pied ou à dos de destriers, les uns combattants, d'autres immobiles, comme frappés de stupeur.

[En pensées, quelque part, dans un ailleurs.]

J'ai mal...
C'est étrange...
oui j'ai vraiment mal...
Ici... en mon ventre... Pourtant...
Pourtant ce n'est pas par là que j'ai péri...
Pourtant je ne suis plus qu'un esprit...
Mais que ce passe-t-il donc ?!
Je ne comprends pas...
Et cette douleur...
J'ai mal...

Messages : 3 Date d'inscription : 16/01/2009

Sinople était une masse, à sa manière certes, mais quand il le voulait, il pouvait être aussi amorphe qu'une larve grasse et luisante. Et c'était ainsi qu'il avait décidé de faire cette partie du voyage. Par le biais des miracles de la nature, le jeune homme dormait sur son alezan, le buste droit, il n'avait que la tête en arrière et ronflotait, dans son inconscient, il se stabilisait en agrippant d'une main ferme le pommeau de la selle, laissant l'autre se balancer contre la robe et les flancs de l'animal, se fiant a ce dernier pour suivre les autres, brave bête. Leur groupe était hétéroclite, il n'avait pas tres bien comprit les liens de qui avec qui, les rencontres, les amourettes, les rancunes. Trop fatigué pour tout cela, il avait toujours écouté d'une oreille oisive et feignante, et quand enfin ils faisaient une halte en taverne il préférait regarder les serveuses aux formes, plutôt que les discussions de forme. Si par hasard c'était dans un verger ou dans un champ que se passait leur arrêt, il dormait ou se faisait un plein ventre de ce qu'il pouvait trouver, encore que les verges a cette saison, pas terrible.

C'est ainsi que le svelte jeune homme dormait a demi sur sa selle, laissant "cheval" qui n'avait pas encore de nom avancer. Sa lance pendouillait dans un étui particulier, pour ne pas gêner, et son écus lui servait pour garder son dos droit, il était sanglé sur son ventre, la protection dans le dos. Il fut abruptement tiré de sa torpeur par un cri, qu'est-ce qui leur prenaient aux autres de faire un raffut pareil, dormir était-il donc aussi dure que de purifier son âme ? Ramenant sa tête, déglutissant péniblement, il fit une grimace pour détendre ses traits qui avaient étés crispés, puis regarda autour de lui. Il ne vit qu'Eusaias s'effondrer avec force de glougloutements sanguins, les femmes crier et le borgne bouger rapidement. Ne comprenant pas ce qui se passait, il lui fallut du temps pour comprendre, puis pour se mettre a réagir. Il prit ses rennes courtes dans la main gauche, puis déboucla une partie de l'étui de la lance, la lança mollement en l'air puis dans le mouvement de l'objet, replaça sa main dans le bon sens. Un adjuvant prenait la fuite, deux a terre, le troisième était hors de son champ de vision et Noeinoeil avait trouvé un compagnon de jeu, une femme s'approchait de la femme par terre, c'était quoi son nom déjà ? Plus important andouille ! Bouge !

Sinople talonna l'alezan qui fit une grande "enjambée" vers la femme au moment ou la cavalière avait son cheval qui cabrait. Faisant glisser son écus pour le ramener un peu sur le devant, il s'interposa entre ceux a terre et cette bonnefemme, raffermissant sa prise sur sa lance, il déclara à "l'ennemie"comme il le put:

Recule femme.

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